Mzab est prestigieux
Le Mzab est prestigieux sans intention de prestige(1)
André Ravereau – Architecte
De nombreux écrivains, géographes, ethnologues, architectes, explorateurs… ont écrit sur le Mzab.
Nous vous proposons quelques extraits de ces témoignages d’une grande valeur. Certains écrits datent du XIXème Siècle et témoignent de ce qu’était le Mzab autrefois.
A la lecture de ces récits anciens, nous sommes surpris par la similitude entre les temps passés et le Mzab actuel.
Malgré le progrès et le développement, le Mzab a su préserver ses particularités et son authenticité.
Simone de Beauvoir
Dans « La force des choses » Simone de Beauvoir, écrivaine française (1908-1986) décrit son arrivée à Ghardaia en ces termes :
« C’était un tableau cubiste, magnifiquement construit : des rectangles blancs et ocres, bleutés par la lumière s’étageaient en pyramide; à la pointe de la colline était fichée de guingois une terre cuite jaune qu’on aurait crue sortie, géante, extravagante et superbe, des mains de Picasso : la mosquée. Les rues grouillaient de marchands et de marchandises : des carottes, des poireaux, des choux à la peau si brillante et si lisse qu’ils semblaient non des légumes mais des fruits. Gras, la face reposée, les Mozabites avaient l’air bien nourris : la plupart des épiciers d’Algérie étaient originaires du M’zab où ils retournaient après fortune faite. »
Manuelle Roche
Manuelle Roche (1931-2010), photographe, enseignante à l’Ecole des Beaux Arts d’Alger, compagne d’André Ravereau, auteur de nombreux livres sur l’Algérie et le M’zab et réalisatrice de film et documentaire. Dans la préface rédigée pour le l’ouvrage « Le Mzab, une leçon d’architecture » d’André Ravereau elle écrit :
« La maison mozabite est grande. Elle l’est, d’une part, car les matériaux sont sur place et la main-d’oeuvre est en principe communautaire, donc non rémunérée ; d’autre part, afin d’offrir plusieurs possibilités climatiques selon les heures et les saisons. »
Hassan Fathy – Architecte Egyptien
Hassan Fathy, architecte Egyptien (1900-1989), s’est longuement exprimé au sujet de l’architecture mozabite lors d’un entretien donné au Caire.
« Je vous comprends d’admirer l’homme qui a travaillé au Mzab avec ses propres mains. Il a lutté contre les matériaux, les contingences, avec sa culture. C’était un duel avec la matière, et lorsqu’il a résolu son problème : il avait créé la beauté. »
« Prenons un homme du Mzab, il a construit sa maison selon sa quotidienneté. Chaque ligne exprime l’être qui l’a faite. Comme dans un habit à sa taille : dedans il se sent à l’aise, il n’est ni trop grand ni trop serré. »
« Les arcades du Mzab sont faites avec des branches de palmier incorporées ; comme dans le béton, l’armature est cachée. Cela m’intriguait. C’est le premier exemple de cette sorte de construction que j’ai connu. C’est très intéressant car les matériaux locaux donnent une forme et cette forme doit être belle… Cela provient de ce que la forme concilie les forces qui agissent, donnant l’esthétique, la beauté. »
André Ravereau – Architecte
André Ravereau est certainement l’un des architectes qui a le plus étudié l’architecture du Mzab.
Dans son ouvrage de référence « Le Mzab, une leçon d’architecture », il présente nombre de croquis et photos qui sont le fruit de ses travaux de recherche sur place.
« Une architecture bonne, c’est à dire répondant au mieux aux besoins et au milieu physique – même construite avec les plus extrêmes simplicité et économie -, peut être belle. Et si elle est belle, elle peut également être prestigieuse, sans intention de l’être. Le Mzab est prestigieux sans intention de prestige. »
André Chevrillon – Académie Française
Les puritains du désert – André CHEVRILLON, membre de l’Académie Française. Librairie Plon 1927. 272 pages.
Récit d’un voyage qui mena André Chevillon à Ghardaia au début du 20ème Siècle. Les descriptions, très détaillées, sont pour la plupart toujours d’actualité :
« Courts et replets, la plupart, bien vêtus, drapés de haïks, de mousselines immaculées, ils (les mozabites) ont des airs de sagesse rassise et confortable. (…) Mais que de richesses, quelle diversité d’étalages, au souk de Ghardaia ! Qui aurait cru que, du désert, peuvent sortir tant de choses désirables ? D’abord, par terre, parmi les chameaux déchargés, les marchandises de poids : ballots de laine, couffins de grains, fagots de r’tem qui sert de combustible, pains de sel vierge, venus de Ouargla. Mais surtout (par terre, toujours sur la poudre du sol) mille humbles assortiments : des gousses rouges de piments, les cailloux résineux du benjoin, du henné en paquets d’herbe sèche, – et tous ces petits tas précieusement rangés, de brindilles, épluchures, dont mon compagnon mzabite me dit l’usage : du bois d’aloês pour le parfum, de l’écorce de noyer pour le tan, des coques de grenades pour la teinture. Et tant de roses pastèques, tant d’oranges ! »
M. Zeys
Voyage d’Alger au Mzab – M. Zeys (1887)
« On nous propose une promenade dans les jardins de Ghardaia. Nous acceptons avec empressement. On avance avec peine dans les étroites ruelles, bordées de murs bas, qui divisent l’oasis entre les divers propriétaires ; montés sur nos mules, les branches basses des palmiers fouettent le visage. Partout on entend le grincement strident des poulies car, on peut le dire jour et nuit on arrose et il y a une population entière d’hommes, d’enfants, dont l’unique labeur en ce monde est d’entretenir les dattiers dans les conditions voulues pour qu’ils vivent et prospèrent. On sait qu’un dattier doit avoir les pieds dans l’eau et la tête dans le feu : le soleil ardent du sud se charge de fournir le feu ; l’eau est fourni par le travail incessant de l’homme. »
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